Victor assisté
Famille Victor
Sourire Victor

Team Totor

Matthys Michel (DCA Lie)

L’incroyable histoire de Victor
 
Notre petit Victor voit le jour le 05 aout 2022 à l'hôpital du Montlégia, de Liège, après une grossesse très surveillée.  Selon les médecins, il est en parfaite santé - vous serez dans 4 jours chez vous, nous annonce-t-on!  Nous sommes aux anges... mais la joie est de courte durée...
Après 3 jours, Victor s’alimentant mal, il est transféré de la maternité vers la pédiatrie, puis aux soins intensifs. Une kyrielles d’échographies et de radios ne révèlent rien, jusqu’à ce que son ventre gonfle et devienne bleuté. On détecte alors une entérocolite, une inflammation des intestins. Une troisième échographie du cœur permet de détecter une communication entre les deux artères, qui implique un mélange entre sang oxygéné et non oxygéné, entraînant une mauvaise distribution vers les membres et organes. C’est probablement la cause de l’entérocolite. Victor est transféré à l’hôpital Saint Luc à Bruxelles, pour être opéré du cœur, en fonction de l’état des intestins. Nous sommes très inquiets et perturbés.  De plus, nous n'avons aucune idée de comment vont se dérouler les prochains jours, entre Victor à Bruxelles et notre premier fils de 4 ans et 8 mois, Louis. 
 
Nous arrivons à Saint-Luc le 24 aout, en suivant l’ambulance qui transporte en urgence notre petit Victor. 
Il est opéré tout de suite des intestins, ceux-ci ayant été perforés par l’infection entre-temps. La chirurgienne nous fait ensuite son compte rendu, qui nous glace le sang : l’opération s’est bien déroulée, mais ce qu’elle a découvert est grave : Victor a un intestin grêle court, de 60cm au lieu de 150 pour un bébé de son âge.  L’infection a fortement endommagé les intestins et le colon. Elle a placé une poche après 10cm, et il faut espérer pouvoir récupérer une partie des intestins restant, et du colon, lors d’une prochaine opération, lorsque l’infection aura disparu. Il lui semble peu probable que notre bonhomme puisse manger et aller à selles normalement par la suite, tout au long de sa vie. De plus, lors de l’admission aux soins intensifs pédiatriques, on a remarqué que ses yeux n’ont pas d’iris- qui est en fait le muscle qui permet de contracter la pupille en fonction de la luminosité. 
Il y a donc plusieurs malformations : cœur, intestins, iris. Ceci fait penser à un problème génétique. Les analyses nécessaires sont réalisées et il apparaît 10 jours plus tard que Victor est effectivement atteint d’un syndrome de dysfonctionnement systémique des muscles lisses (MSMDS – Multisystemic Smooth Muscle Disease Syndrom). Or, notre corps est parcouru de muscles lisses, qui assurent notamment la contraction et la dilatation des vaisseaux sanguins, des organes digestifs, l’irrigation du cerveaux, etc. Toutes ces fonctions sont donc potentiellement menacées d’être privées ou noyées de sang en fonction de l’évolution de notre petit bonhomme… avec les conséquences qui peuvent en découler. 
A ce stade- difficile d’imaginer notre choc- c’est un conseil de médecin qui décide de réaliser l’opération du cœur, sans quoi Victor agoniserait durant des années d’une insuffisance respiratoire. Il est décidé de ne pas s’acharner si l’opération tournait mal. Elle se déroule en deux temps, avec une ouverture de la cage thoracique, une déviation de tout son sang durant quelques minutes… et la fermeture de la cage thoracique 2 jours après - tout cela se déroule sans incident et Victor se rétabli particulièrement vite.  
Il récupère, tout en étant alimenté directement dans le sang via une voie centrale, qui est remplacée par un dispositif plus durable, un « broviac », au cours d’une opération mi octobre.  En novembre, il est réopéré deux fois des intestins, pour tenter de remettre en continuité son système digestif, mais cela n’est pas possible car il est trop abîmé.  Une 5ème opération au niveau abdominal est prévue pour mars, car il y a toujours du liquide qui stagne dans sont intestin, ce qui dégrade le foie.  Entre-temps, Victor évolue toujours, entre les câlins de Maman, de Papa, les visites de Louis, les séances de Kiné et les attentions permanentes de ses « taties » infirmières.    A la mi mars, il est à nouveau opéré des intestins, ce qui réussit bien, mais il fait un blocage respiratoire et une hémorragie pulmonaire la nuit même de l’opération.  Heureusement, comme le post-opératoire immédiat est réalisé aux Soins Intensifs Pédiatriques, il est immédiatement réanimé, et après un nouveau coup de frayeur, nous retrouvons notre petit ange si souriant une grosse semaine plus tard.  Il est passé par le chat de l’aiguille. Depuis, Victor se rétabli doucement, plus aucune opération n’est envisagée, il nous faut alors nous préparer pour enfin rentrer à la maison à quatre, mais cela nécessite un apprentissage de nombreux gestes médicaux.  Nous avons déjà pas mal appris avec les infirmières, mais il faut consolider tout cela, car le saut vers la maison ne sera pas évident.
 
Voilà pour le médical.
A côté de ces interventions et soins, il y a bien évidemment un océan d’émotions, des montagnes de tracas organisationnels et de démarches administratives, qui rendent notre quotidien des plus chaotiques.
Depuis ce 5 août 2022, c’est une tornade qui s’abat sur notre petite famille… Jessica et / ou moi nous relayons au chevet de Victor H24. Nous tentons d’offrir une vie là moins perturbée possible à Louis, d’assurer notre rôle de parents de la façon la plus normale réalisable pour Victor.  Heureusement que les épreuves nous soudent en tant que couple, car nous ne voyons plus beaucoup, en-dehors de nos « relèves de garde » à l’hôpital.  Il est difficile de décrire la vie dans une chambre d’hôpital durant une si longue période, avec notre petit trésor.  C’est une sorte de course permanente, pendant laquelle on n’a d’emprise sur rien.  Les infirmières sont débordées, les infos importantes ne passent pas toujours, tout tourne autours de la santé de Victor, des examens et opérations, des milles aléas quotidiens.  Prendre sa douche chaque jour et manger à des heures décentes relève parfois du défi.  Et lorsque nous rentrons à la maison, il y a Louis, qui exige bien légitimement d’autant plus d’attentions, toutes les tâches ménagères, et les procédures administratives, factures et autres démarches.  Des dizaines de mails et d’appels téléphoniques avec notre Mutuelle, où nous avions également notre assurance hospitalisation, au fonctionnement absolument mauvais… la reconnaissance de la maladie de Victor, toujours pas validée… et des factures qui s’accumulent, avec une proportion grandissante de médicaments et soins non pris en charge par la mutuelle ni par l’assurance. 
A tout ceci s’ajoutent également les embarras liés au chantier de notre maison en plein rénovation depuis quelques mois avant la naissance de Victor.  Vu l’ampleur des travaux, nous louons une petite maison en attendant, mais Papa n’a plus du tout l’occasion de réaliser les travaux envisagés.  Heureusement, ses collègues constituent une formidable équipe pour aider à avancer sur le chantier, et avec quelques membres de la famille et amis, le nid familial se construit petit à petit.  Toutefois, le corps médical nous explique qu’au vu de la santé de Victor, il faut que la maison soit absolument « propre », alors que nous projetions d’y emménager dès que possible pour y faire les travaux restants dans un avenir plus ou moins proche.
 
 
Professionnellement, c’est une grosse remise en question de notre avenir.  Pourrons-nous continuer à travailler tous les deux ?  A temps partiel, plein ?  Selon quelles modalités ?  Victor ne pourra a priori pas fréquenter un milieu d’accueil – et de toute façon, la place qui lui était réservée a été réattribuée par l’ONE.  Comment pourrons-nous organiser le quotidien ?  Toutes ces questions nous taraudent, et le moral n’est pas toujours là. Nous traversons des moments de révolte, de sentiment d’injustice, de désespoir, surtout de peur… il nous faut apprendre à vivre jour après jour, parfois même heure par heure, sans se projeter. 
 
Enfin, en avril 2023, Victor est transféré de l’hôpital Saint-Luc au Mont-Légia, où nous suivons deux semaines de formation pour apprendre les gestes qui émailleront le quotidien de notre petite famille : déconnecter Victor de sa pompe de nutrition parentérale le matin, et l’y brancher en fin de journée, nettoyer sa gastrostomie, soigner ses plaies éventuelles, le pansement du broviac, etc.  Nous restons une semaine de plus car sa peau est irritée au niveau de sa stomie, et nous testons des dizaines de solutions différentes pour faire adhérer la poche à sa peau à vif… aucun spécialiste n’a de solution, ce qui fait de ces moments de véritables tortures pour Victor… nous avons parfois une dizaine de fois par jour à changer cette poche qui fuit, se déchire, ce qui irrite sa peau et le fait soufrir.  Enfin… cela s’améliore un peu et nous rentrons tous les 4 à la maison.  C’est un soulagement… nous pouvons enfin retrouver un peu plus de normalité.  Mais la gestion du quotidien reste compliquée.  Heureusement, une équipe de super infirmières à domicile nous accompagne pour les (dé-)branchements et les soins, deux fois par jour.  Car à côté, nous devons gérer des stocks de kits de branchement, de soins, de poches, de matériel médical en tout genre, aller chercher toutes les semaines les poches de nourriture pour alimenter Victor, etc.  Les journées sont plus que remplies !  Nous nous y habituons plus ou moins, et en octobre, notre maison rénovée est habitable… Un nouvel élan de solidarité nous entoure et nous réchauffe le cœur alors que nous déménageons et nous retrouvons dans notre nid douillet, synonyme d’une sérénité dont nous avons rêvé ces derniers mois… 
 
Depuis… Maman et Papa ont repris le travail, à temps plein…le quotidien est bien chargé… souvent compliqué… stressant, haletant… mais le plus souvent, ensoleillé par la bonne humeur quasi permanente, les rires et les sourires ravageurs de notre Victor.  Nous avons déjà fait quelques passages par les urgences…Louis surmonte les difficultés et s’avère un grand frère complice et serviable.  Nous parvenons à limiter les tensions inévitables lorsque nos emplois du temps se téléscopent, et nous trouvons la force de rester positifs et enthousiastes. 
 
Lorsque la maladie génétique avait été identifiée, Maman avait fait des recherches et découvert l’existence d’un petit groupe facebook, réunissant les familles ou personnes atteintes un peu partout dans le monde.  Nous avions appris qu’une chercheuse de l’université de Boston, aux Etats-Unis, travaillait d’arrache-pied sur cette maladie surnommée MSMDS.  Elle est entourée d’une équipe extrêmement motivée dont chaque parent ou patient fait en quelque sorte partie – nous avons des échanges via le groupe facebook et en vidéo-conférence, notamment via un génécien de Saint_Luc.  Il existe un sérieur espoir pour rendre fonctionnels les muscles lisses de Victor : une thérapie génique est en cours de test sur des brebis et des souris, elle se montre efficace… et on parle de tests sur l’humain dès 2025 !  Ceci ne gommerait pas tous les problèmes dont notre fils est victime, mais cela rendrait son avenir bien moins incertain !  Lorsqu’on nous propose de l’aide, nous versons les dons sur un compte de façon à préparer un voyage médical et un traitement à Boston, nous l’espérons prochainement !